vendredi 31 mai 2013
« Comme une bête »
Joy Sorman
Éditions Gallimard
Joy Sorman
Née à Paris en 1973, Joy Sorman, fille de Guy Sorman essayiste et homme politique français, a été professeure de philosophie au début de sa vie professionnelle.
Son premier roman paru en 2005 « Boys, boys, boys » est un récit en partie autobiographique où la narratrice, trentenaire et féministe remet en cause, dans son comportement quotidien, les modèles établis ; il obtient le prix de Flore.
« Du Bruit », consacré au groupe de rap NTM est publié en 2007.
Elle publie, en octobre 2007, « 14 Femmes, pour un féminisme pragmatique », écrit en collaboration avec Gaëlle Bantegnie, Yamina Benahmed Daho et Stéphanie Vincent.
En mai 2011, elle s’installe durant une semaine à la gare du Nord à Paris afin d’observer la gare à toutes les heures de la journée. Son livre « Paris gare du Nord » en témoigne.
Joy Sorman est accueillie en 2012 en résidence artistique dans l’entreprise le Lit National, dans le cadre du programme Écrivains en Seine-Saint-Denis.
Par ailleurs Joy Sorman assure une chronique dans l'émission Ça balance à Paris sur Paris Première, dans la Matinale de Canal Plus et dans l'émission Eclectik de Rebecca Manzoni sur France Inter.
Joy Sorman est lauréate du prix Georges Brassens 2012 pour son livre « Comme une bête ».
« Comme une bête »
Après « Boys, Boys, Boys », et surtout « Gros oeuvre », livre paru en 2009 dans lequel elle cherchait déjà à saisir par l’écriture des gestes et un vocabulaire techniques – ceux du bâtiment -, Joy Sorman creuse un sillon néonaturaliste étonnamment moderne.
Son exploration du monde de la boucherie et de ses mythologies – les vampires mondains qui visitaient les abattoirs au petit matin pour boire du sang frais, Rocky dans la resserre au milieu des bêtes pendues à des crochets… – est aussi, et peut-être avant tout, l’exploration d’un langage. Sorman le dissèque avec la même dextérité que celle dont Pim fait preuve pour manipuler et sculpter la viande ; elle se l’approprie dans les moindres détails anatomiques pour composer un roman écartelé entre réalisme et onirisme, qui évoque les boeufs écorchés de Rembrandt ou de Soutine.
Mais le livre n’est pas seulement descriptif, monochrome grenat de fibres, de gras et de nerfs.
Il charrie aussi une réflexion sur notre rapport à l’animal et à ce que l’on mange, questions au coeur des débats de société mais aussi de la littérature depuis la sortie, l’an dernier, de l’essai de Jonathan Safran Foer « Faut-il manger les animaux ? », enquête choc sur l’élevage industriel.
Joy Sorman, elle, adopte un point de vue plus anthropologique (Claude Lévi-Strauss est cité en exergue) et interroge l’aspect primitif du lien entre l’homme et les bêtes.
À quel point sommes-nous ce que l’on mange ?
Un texte de chair et de sang.
Elisabeth Philippe - Les Inrocks